L’actualité de la semaine a aussi été marquée par les sanctions prises contre deux professeurs du lycée de Diouloulou, M. Lambal et M. Diatta. C’est d’abord un rapport confidentiel du Proviseur dudit lycée, trouvé dans les réseaux, qui incrimine les professeurs. M. Lambal et M. Diatta, » en compagnie de quelques élèves sont venus demander à l’administration de libérer les élèves parce que le pays va mal (…) ils ont pris aussitôt la décision sur eux d’aller de classe en classe, déloger les élèves « , a écrit le Proviseur. Et l’inspecteur d’académie de Ziguinchor d’affirmer qu’après avoir reçu ce rapport, il a demandé au Proviseur de servir des demandes d’explication aux deux professeurs et d’exploiter leur réponse sur un autre rapport.
Ceci étant fait, l’IA a pris sa décision. Dans son rapport, l’IA écrit ceci: »Le rapport du Proviseur relève que les concernés reconnaissent avoir commis une faute. Ils ont fait leur mea culpa et on juré ne plus s’embourber dans une si délicate besogne. » Il poursuit en considérant que » leur mea culpa et leur engagement à ne plus s’embourber dans cet amalgame n’enlèvent à rien la gravité des faits commis. » Il évoque « une faute lourde » commise par ces professeurs.
Ainsi, il a décidé leur suspension et leur traduction au conseil de discipline en demandant leur radiation de la fonction publique. A la lecture de toutes les informations que nous avons recueillies, il apparaît que le Proviseur et l’ IA sont dans le FAUX. L’un des collègues habite en face du lycée. La veille du procès d’Ousmane Sonko, les manifestations avaient déjà commencé, il a entendu (au sortir d’un cours de renforcement) des gens dire qu’il n’ y aura pas cours le lendemain, dans la commune. Et puisque lors des manifestations précédentes, les gens venaient dans le lycée, sortaient les élèves par des jets de pierres, il est venu ce jour pour les dissuader de procéder de la sorte.
Les deux professeurs ont intercepté les manifestants dans la cours et leur ont demandé de ne pas s’attaquer aux élèves, mais d’aller plutôt vers l’administration. Ils ne sont allés dans aucune salle de classe pour déloger des élèves. Nulle part dans les réponses à la demande d’explication servie par le Proviseur, ces collègues n’ont reconnu les faits qui leur sont reprochés. Au contraire, ils ont apporté toutes les preuves de la fausseté de ces accusations. C’est alors archi faux que le Proviseur ait dit que « les concernés » ont « fait leur mea culpa « .
Après avoir réfuté les accusations, les professeurs ont présenté leurs excuses par rapport aux incompréhensions que leurs interventions auprès des manifestants ont créées. Ceci n’a absolument rien à voir avec des excuses par rapport à une faute commise, comme l’a dit l’IA citant le rapport du Proviseur. Et l’inspecteur d’académie, sans auditionner les présumés coupables, les a sanctionnés sur la base d’un faux rapport du Proviseur. D’après nos sources, le Proviseur était absent du lycée au moment des faits. Il est réputé absenteiste. C’est l’IA qui l’a appelé pour lui demander ce qui s’était passé dans son école. Nous nous interrogeons sur l’identité de la personne qui a informé l’IA.
Qui, à part le Proviseur, avait qualité à le faire ?
C’est à la suite de l’appel de l’IA que le Proviseur est venu au lycée, et le Censeur lui a rendu compte. De sources sûres, c’est ce dernier qui a écrit le rapport, le Proviseur n’a fait qu’envoyer. Mieux, ce dernier est un Professeur de français, à quelques années de la retraite, il ne pourrait pas produire un rapport truffé de fautes. Il nous est revenu que le Censeur est un farouche opposant à Ousmane Sonko et a une relation tendue avec les membres de l’équipe pédagogique qui sont du parti Pastef. Et outre, l’intendant qui serait de mèche avec le Censeur, est un militant de l’APR, un proche de Lo Diatta ancien directeur du Centre régional des oeuvrew universitaires de Ziguinchor (CROUZ). Il doit même son poste d’intendant à ce dernier, d’après un de nos interlocuteurs. Cela pose la problématique de la nomination des Intendants dans les lycées. Ce sont des postes où la clientèle politique est casée. Vers la fin du régime du Président Abdoulaye Wade, entre 2010 et 2012, la plupart des Intendants nommés étaient de la Génération du concret dirigé par Karim Wade et dont se réclamait le ministre de l’éducation, Kalidou Diallo. De tous ces éléments, il ressort un règlement de compte politique. Mais il est très mal ficelé, les actes posés par l’administration sont d’une extrême légèreté, au point de ne pas pouvoir avoir une base juridique qui favoriserait une « radiation » de ces collègues.
Même si les collègues étaient responsables de ce qui leur est reproché, les réponses à leur demande d’explication, exploitées par le Proviseur puis l’IA, ne comportement d’éléments suffisants pouvant prouver leur culpabilité. L’IA est aussi dans une logique indigne d’un administrateur. Il est dans l’excès de zèle et l’excès de pouvoir. Pour le même lycée, au cours de cette année scolaire, l’IA a exclu définitivement des élèves grévistes. Et la plus grosse bizarrerie dans cette affaire, c’est le fait que l’IA demande la radiation des professeurs pour le motif d’une perturbation des enseignements-apprentissages pendant une journée puis décide de suspendre les cours pendant une semaine. Les syndicats sont interpellés sur ces manœuvres de l’administration du lycée de Diouloulou et de l’IA de Ziguinchor qui constituent un précédent dangereux pour tout le corps enseignant.
Babacar Diouf, professeur d’histoire et de géographie au lycée de Nguekokh