Un nouveau cirque politique s’installe sous nos yeux fatigués : un mouvement baptisé pompeusement « Rappel à l’Ordre ». Mais rappel de quoi, au juste ? De la décence perdue, certainement pas. Car derrière ce nom emprunté aux manuels d’éducation civique, se cache en réalité la dernière trouvaille d’un rappeur raté reconverti en bateleur de foire : Abdou Karim Gueye, alias Krum Xax.
Un homme qui ne pèse rien dans ce pays, sauf le poids de ses indignations à géométrie variable. Lui qui, hier encore, jurait sur tous les plateaux qu’il fallait brûler l’ordre établi, se découvre aujourd’hui chef d’escadron moral, brandissant son « rappel » comme un chapelet en plastique made in China.
Mais attention, derrière ce clownisme se dresse une réalité beaucoup plus sombre : une coalition de rescapés politiques et de délinquants financiers, les éternels pilleurs de la République. Ceux-là mêmes qui, hier, se disputaient les restes de nos finances publiques comme des chiens autour d’un os, se retrouvent aujourd’hui main dans la main. Non pas pour sauver le pays – ne rêvons pas – mais pour sauver leur peau devant le pool judiciaire financier. Les ennemis d’hier se redécouvrent frères siamois dès qu’il s’agit de préserver leurs villas, leurs comptes bancaires et leurs privilèges mal acquis.
Et là, tenez-vous bien : ces messieurs-dames en perdition crient à pleins poumons des slogans lunaires comme « Libérez les Mansour Faye ! Libérez les Farba Bank ! Libérez les Lat Diop ! ». En somme, libérez ceux-là même qui ont transformé le trésor public en tirelire familiale. Voilà donc la nouvelle lutte révolutionnaire : réhabiliter les fossoyeurs du pays. Une caricature de l’impunité servie en plein air, comme un sketch mal écrit mais joué en boucle.
Mais le ridicule ne s’arrête pas là. Dans ce théâtre d’ombres, on réclame aussi la libération d’une nouvelle caste : les activistes de pacotille recyclés en chroniqueurs de télé de bas étage. On applaudit pour la cause d’un Abdou Nguer, tailleur raté devenu couturier des polémiques, défenseur improvisé d’Adji Sarr avant de se reconvertir en grande gueule de plateau. On verse une larme pour un Badara Gadiaga, « tiogman » diplômé, passé du militantisme de trottoir aux micros complices de Youssou Ndour, celui-là même qui a trouvé plus confortable de rester muet comme une carpe depuis l’ascension de Sonko et Diomaye.
Et le chef d’orchestre ? Toujours le même : Karim Kruh… Kraah… ou plutôt Krum Xax (excusez ma langue, elle se tord devant tant de ridicule). Cet indécent patenté, devenu invité vedette des plateaux de Jaakarlo, ce temple cathodique des kulunas télévisés. Ironie du sort : à l’époque où Krum Xax incendiait Macky Sall et son régime, jamais cette télé n’aurait osé lui tendre un micro. Mais aujourd’hui, pour frapper Sonko et Diomaye, la porte s’ouvre en grand.
En vérité, ce « Rappel à l’Ordre » n’est rien d’autre qu’un rappel à l’imposture. Une troupe de saltimbanques en quête de survie politique, habillée des oripeaux de la morale et financée par ceux-là mêmes qui ont saigné ce pays à blanc.
Le peuple sénégalais mérite mieux que cette comédie indécente. Mais peut-être faut-il rappeler à Karim et ses amis que le véritable « ordre » que réclame le pays, c’est celui de la justice.
Malick Ba