Le gouvernement du Sénégal et le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC) ont franchi une étape décisive vers la paix en signant, ce dimanche, un accord à Bissau, sous l’égide du président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embaló. L’annonce a été faite par le Premier ministre Ousmane Sonko, en visite officielle en Guinée-Bissau.
Une délégation du gouvernement du Sénégal, conduite par le Premier ministre Ousmane Sonko, et une autre des combattants unifiés du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc) du Front sud ont signé, dimanche 23 février 2025, un accord de paix instaurant un cessez-le-feu dans la partie sud de la Casamance. Cet accord de paix, entériné à Bissau, sous l’égide du président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embaló, prévoit aussi la démobilisation des combattants du Front sud, basé à Kassolol et dirigé par César Atoute Badiate, ainsi que leur réinsertion dans la société. Le document d’accord final a été aussi paraphé par le représentant de l’organisation humanitaire suisse, appelée « Hd », qui a participé aux négociations, ainsi que par le chef de la division de contre-espionnage militaire de Guinée-Bissau, le général de division Samuel Fernandes. Dans son allocution, Ousmane Sonko est revenu sur l’importance de ce protocole de paix.
« Nous venons de clôturer les travaux portant sur les négociations entre le Mfdc et l’État du Sénégal. Ce travail est le fruit d’une réunion du Comité de négociations qui est à pied d’œuvre depuis trois jours à Bissau. Cet accord constitue un grand pas pour un retour définitif de la paix en Casamance », a déclaré Ousmane Sonko qui a tenu à rappeler que la paix en Casamance constitue une priorité pour le gouvernement sénégalais.
« Le président Bassirou Diomaye Faye a un plan ambitieux, appelé « Plan Diomaye pour la Casamance » ; un plan de développement économique et social qui ne peut être mis en œuvre sans une paix définitive. Pour cela, nous saluons l’engagement du chef d’État guinéen Umaro Sissoco Embaló en faveur d’une paix définitive en Casamance. Tout ce qui impacte le Sénégal impacte aussi la Guinée-Bissau et vice-versa », a-t-il dit.
DEMOBILISATION ET REINSERTION EFFECTIVE DES REBELLES DANS LA SOCIETE
Pour sa part, le président Umaro Sissoco Embaló a rappelé, dans sa déclaration, la nécessité de préserver un espace de paix dans toute la sous-région. « On ne peut pas jouer avec la stabilité du Sénégal en Guinée-Bissau, quel que soit le président de la République. De même, le Sénégal ne peut pas jouer avec la stabilité de la Guinée-Bissau, quel que soit le président de la Guinée. Pendant le conflit politico-militaire de 1998, un grand nombre de personnes a fui vers le Sénégal », a-t-il soutenu. Ce nouvel accord vient consolider le cessez-le-feu en vigueur depuis le 4 août 2022, date du précédent accord signé par le gouvernement sénégalais et le groupe rebelle Mfdc du Front sud. Cette entente consistait en une déclaration d’engagement mutuel où les différents belligérants avaient manifesté leur volonté de parvenir à un accord de paix définitif en Casamance, en proie à un conflit armé depuis 1982. Ce protocole avait permis le retour progressif des déplacés dans la partie sud de la Casamance.
LES POINTS MAJEURS DE CES POURPARLERS
Dans le document paraphé par les différentes parties et qui compte 7 points, il reste quatre questions à épuiser et qui préoccupent les ailes politiques et combattantes unifiées du Mfdc, qui ont soumis un document intitulé «Proposition de points à discuter», comme la grâce présidentielle et l’amnistie. Ce sont des préoccupations vitales pour continuer à mener à bien ce processus dont l’un des signataires, César Atoute Badiate, est sous le coup d’un mandat d’arrêt international après avoir été condamné par contumace, à Ziguinchor, à la prison à perpétuité pour assassinat et insurrection armée, en lien avec le massacre en janvier 2018 de 14 hommes à Boffa-Bayotte. En réponse à ces demandes, le Comité provisoire fournira la liste des personnes concernées pour bénéficier d’une grâce présidentielle, «qui ne peut être accordée qu’après condamnation définitive par la Justice». Et il va élaborer un mémorandum sur les faits visés.
Par ailleurs, la délégation sénégalaise est restée ferme sur l’intangibilité de ses frontières, en rejetant évidemment, sans ambages, toute séparation de la Casamance d’avec le Sénégal. En outre, les deux parties se sont accordées sur la mise en place d’un comité technique chargé d’examiner dans tous leurs aspects, les questions sécuritaires sur le terrain, impliquant du côté sénégalais les Forces armées, la police et les Eaux et forêts. A propos du déminage humanitaire et de la sécurisation du processus de retour concerté des déplacés et réfugiés, l’Etat a assuré que ces points sont pris en compte dans le Plan Diomaye pour la Casamance.
SITUATION GEOGRAPHIE
La Casamance, région située au sud du Sénégal et séparée du reste du pays par la Gambie, est le théâtre d’un des plus anciens conflits d’Afrique, qui a éclaté en 1982. Ce conflit a causé des milliers de victimes et freiné le développement économique de la région. Bien que la violence ait diminué ces dernières années, la recherche d’une paix durable est restée une priorité pour les autorités sénégalaises.
Cet accord s’inscrit dans la continuité des efforts entrepris pour pacifier la région. Le 13 mai 2023, au moins 250 combattants du MFDC avaient déjà déposé les armes lors d’une cérémonie organisée à Mongone, dans le département de Bignona, ou le mouvement séparatiste possédait autrefois une importante base militaire. Avec cette avancée majeure, le Sénégal se rapproche d’une résolution définitive du conflit en Casamance, ouvrant ainsi la voie à un développement plus soutenu de cette région au potentiel économique important.
Seydou GASSAMA