Géographie de la commune de Palmarin.
Palmarin (ou Palmarin Fakao ou Nguedj) est une localité côtière du Sénégal, située dans le Sine-Saloum, au début de la pointe de Sangomar, entre Joal-Fadiouth et Djifer à 1 mètre d’altitude.
Carte : Situation géographique de la commune
Située au sud de Joal, Palmarin est une ancienne île devenue une presqu’île du fait de l’évolution géomorphologique de la zone et de la mise en place d’une infrastructure routière. Palmarin est un carrefour, un lieu de passage vers les îles du Saloum. Palmarin est une commune de la région de Fatick. Il est composé de quatre villages : Ngallou, Nguethie, Ngouloumane, Diakhanor. Djifére, port de pêche et d’embarquement vers les îles du Saloum et la pointe de Sangomar, est jusque-là considéré comme une excroissance du village de Diakhanor. Palmarin est dans une zone géoclimatique caractérisée par la fragilité de son écosystème fortement entamé par l’avancée de la mer, la sécheresse et la salinisation des sols, ce qui a entraîné la dégradation du couvert végétal, la disparition de certaines espèces animales (pintades, biches), végétales et la baisse de la production agricole (riz par exemple).
Carte : Occupation du sol
À proximité se trouve la Réserve naturelle communautaire de Palmarin, appréciée pour son paysage de mangrove, le calme et l’observation des oiseaux. Erigée en 2001 son objectif est la mise en place d’un mécanisme participatif de conservation, de restauration et de valorisation durable de la biodiversité. Un comité de gestion est créé en 2011 pour sa protection. Depuis lors, des améliorations sont notées grâce aux efforts consentis par un ensemble d’acteurs.
Cette zone de mangrove est une zone où l’occupation des zones côtières par les populations est très intense. La pression sur la ressource en bois de mangrove est donc importante. Les voies d’accès à la zone sont nombreuses et beaucoup de populations extérieures viennent s’y approvisionner en bois, ce qui augmente encore la pression sur la mangrove. La zone est proche de l’océan et est fortement exposée aux phénomènes d’érosion et d’ensablement, ce qui explique la disparition progressive du Rhizophora et le développement de l’Avicennia (qui contrairement au Rhizophora, supporte les sols sableux). Dans cette zone, l’accent doit être mis sur les activités de restauration de la mangrove.
La Communauté de Palmarin s’étend sur une superficie de 77 km2 dont 12 % de sol sablonneux propres à l’agriculture, 40 % de mangrove dégradée qui borde les chenaux (bolong dans le langage courant) et 48 % de tanne et de vasière dont l’influence de la sécheresse et le déboisement ont accentué l’acidité. Elle est limitée à l’Est et au Sud par les bras de mer Le Sine et Le Saloum, à l’Ouest par l’Océan Atlantique et au Nord par la Communauté rurale de Fimela. Elle regroupe cinq villages administratifs : Sam-Sam, Sessène, Nguethie, Ngounoumane et Diakhanor. C’est Diakhanor qui abrite en son sein, le hameau de Djiffer.
Cependant, si l’on considère l’ossature ancienne jusqu’en 1927 (année du raz-de-marée qui a provoqué la destruction des agglomérations), l’on pense à trois entités quand on parle de Palmarin tout court : Ngalou, Sam-Sam et Sessène). Et lorsque l’on parle de Facao, on fait référence à Nguethie et Ngounoumane tandis que Diakhanor renvoie au premier repère spatial de la Dynastie Sérère avec le passage de Mansa Waly Dione après la dislocation du royaume du Gabou. Cette dynastie part de 1185 à 1969 avec la mort du dernier roi Mayécor Diouf.
Sur la superficie de 77 km2 vive une population qui tourne autour de 10 927 habitants en 2023 : soit 6224 hommes contre 4703 femmes. Soit une densité moyenne de peuplement est 141,9h /km2.
Un avenir incertain face à l’érosion côtière (voir images de l’impact de l’érosion côtière)
Coincé entre l’océan et le fleuve, Palmarin reste exposé et vulnérable à l’érosion côtière. L’incertitude, l’angoisse marquent les esprits particulièrement ceux des populations habitant dans la partie occidentale qui fait face à l’océan. Les premières victimes ont été contraintes d’abandonner leurs maisons sous le grondement des vagues de mer…La réserve naturelle est devenue le lieu de refuge des déplacés internes. Ce qui hypothéque l’avenir de la nature et du coup aggrave la situation de vulnérabilité. D’où la nécessité d’une solution durable.
La mangrove : caractéristiques et importance en lien avec le développement durable
Au Sénégal, les mangroves sont rencontrées sur le fleuve Casamance, dans l’estuaire du Saloum et aux abords de l’embouchure du fleuve Sénégal.
L’évolution a provoqué une convergence des solutions des plantes végétales des mangroves aux problèmes de la salinité variable, des variations des marées (inondation), des sols sans oxygène et de la lumière du soleil intense de la vie dans les tropiques. Les plantes se développant dans la mangrove doivent donc être adaptées à un milieu hostile :
• une salinité élevée ;
• des racines immergées ;
• une faible oxygénation du sol due à la vase ;
• un sol instable ;
• des eaux chaudes.
Les palétuviers sont les principales espèces végétales de la mangrove. Ils ont su s’adapter à un milieu contraignant.
Adaptation à une salinité élevée
Ces plantes tolèrent très bien le taux de sel élevé de la mangrove. On dit que ces plantes sont halophiles ou plus exactement halo-résistantes. Par exemple, les palétuviers rouges s’isolent du sel en ayant des racines imperméables qui se subérisent fortement, agissant ainsi comme un mécanisme d’ultrafiltration pour éliminer le sel du milieu. L’eau de végétation contient ainsi jusqu’à 90 %, et dans certains cas jusqu’à 97 % moins de sel que l’eau dans laquelle les racines baignent. Tout le sel qui rentre dans la plante s’accumule dans les pousses et est concentré dans de vieilles feuilles qui servent alors de hangar, stockage éloigné dans les vacuoles des cellules végétales. Les palétuviers blancs (ou gris) peuvent sécréter le sel par l’intermédiaire de glandes à sel à la base des feuilles (d’où leur nom puisqu’elles sont couvertes de cristaux blancs de sel).
Adaptation aux marées
La mangrove est parfaitement adaptée au cycle des marées qui sont une des sources d’énergie du système écotonial particulier qu’est la mangrove.
Adaptation à une faible oxygénation du sol
Le sol de la mangrove est constitué de vase littorale, un milieu souvent fortement anaérobie (sans oxygène), sauf quand il s’agit de sable. La respiration des arbres est donc assurée grâce à des organes complexes développés dans les racines. Par exemple, les palétuviers rouges, qui peuvent vivre dans les secteurs les plus inondés, poussent vers le haut au-dessus du niveau d’eau avec des racines.
Place de la Mangrove dans le développement en lien avec les objectifs du développement durable
L’importance de la mangrove doit s’apprécier en lien avec son apport dans la réalisation des objectifs du développement du durable.
La mangrove procure des bénéfices aux populations en matière de sécurité alimentaire (et aide ainsi à la réalisation de l’ODD 1, 2, et 8), de protection des côtes contre l’assaut des vagues (ODD 14) et de stockage de carbone (ODD 7 et13). Les formations forestières de mangrove participent à l’équilibre dynamique des écosystèmes côtiers (ODD 6 et 15). La rupture de la Pointe de Sangomar en 1987 a permis de témoigner de la fonction protectrice des palétuviers contre l’inondation des îles habitées à la suite de l’évènement.
L’exploitation des palétuviers concerne les feuilles et/ou l’écorce de mangrove pour la teinture et le traitement de certaines maladies. Les feuilles bouillies de Conocarpus erectus sont conseillées en bain corporel contre la gale en zone de mangrove selon les coutumes(ODD3). La décoction des feuilles sénescentes d’Avicennia germinans est conseillée aux femmes comme boisson après la délivrance pour venir à bout des pertes de sang selon les croyances locales. Il est également conseillé aux femmes d’inhaler la vapeur émanant de cette décoction pour les premiers soins après l’accouchement.
La mangrove constitue un lieu d’hébergement des oiseaux. Ce qui ouvre la voie au partenariat dans le cadre de leur protection, mais aussi une opportunité pour le tourisme (ODD 9, 15 et 17).
Selon les savoirs locaux, l’exploitation des palétuviers montre que l’apex des rhizophores non encore en contact avec les eaux de mer est utilisé pour soigner les maux de dents après chauffage au feu de braises. Il est aussi utilisé comme aphrodisiaque en association avec du miel en macération dans de l’eau douce. Dans le domaine de la pêche aux seiches, les brindilles et les feuilles de mangrove à l’état frais sont utilisés pour garnir les pièges en cageot. Le système consiste à remplir le cageot de cette matière végétale pour simuler dans les fonds marins un milieu écologique favorable à la cachette des individus de l’espèce(ODD8). Le bois de mangrove est aussi utilisé dans la confection des toits de case, comme étais dans le bâtiment, bois de chauffe pour la cuisine et le fumage du poisson. Il est également utilisé dans la transformation des coquilles de mollusques en chaux pour la construction des maisons ou le remblayage des zones marécageuses pour l’extension des habitations (ODD 9).
Entre autres usages, les caprins broutent les feuilles et les propagules ayant chuté des palétuviers du genre Rhizophora. Les bovins quant eux descendent occasionnellement dans la mangrove pour brouter les feuilles et les diaspores de Rhizophora.
La mangrove est un lieu de reproduction de certaines espèces vulnérables telles que la tortue marine, d’occurrence d’espèces menacées comme le lamantin et de certaines espèces de dauphin (cas du Delta du Saloum). La zone insulaire exondée est le refuge de certaines espèces végétales guinéennes. Il apparaît donc que les rôles d’accueil, de refuge, de reproduction, de nourriceries, d’entretien et de recyclage de la matière organique sont les piliers des fonctions écologiques de la mangrove.
Les principaux facteurs de dégradation de la mangrove sont : les coupes abusives de bois frais, la salinité des eaux de mer due à la baisse de la pluviométrie, l’ensablement des vasières et la coupe des rhizophores au cours de la cueillette des huîtres…
Si on ne prend pas garde dès à présent, cette situation risquerait de rendre précaires les conditions d’existence durable de l’homme dans la zone côtière.
D’où la nécessité d’une bonne gouvernance (cadre institutionnel, législatif et réglementaire) à la hauteur de l’importance de la mangrove ainsi que d’initiatives (reboisement, restauration et protection) pertinentes au niveau national, local et communautaire.
Assainissement (eaux usées et ordures ménagères) : des contraintes surmontables.
La zone de palmarin est caractérisée par :
. Une urbanisation non structurée qui n’est pas favorable à un assainissement classique.
. Une nappe phréatique très proche du terrain naturel et pire affleurant qui n’est pas favorable à des fosses septiques et des réseaux d’assainissement ; des fosses étanches y sont érigées avec des vidanges fréquentes.
. Une très faible consommation en eau en raison des difficultés d’accès à des ouvrages d’eau potable : elles sont généralement alimentées par des puits ou des camions citernes. Par conséquent les rejets d’eaux usées qui représente 80% de la consommation en eau.
. Une faible assiette foncière qui ne favorise pas des stations d’épuration extensive ;
L’analyse des contraintes ci-dessus nous conduit vers des choix suivants :
- Fosses étanches pour les eaux usées vannes et puisard pour les eaux usées ménagères.
- Réseaux petit diamètre qui aboutit à des stations d’épuration appropriées.
- Envisager la mise en place de toilettes mobiles.
En l’absence d’une décharge et compte tenu des contraintes du milieu, on pourrait organiser une pré collecte stockée dans un espace aménagé en vue d’un transfert des ordures ménagères vers une décharge en dehors de la commune (Soutien du projet de Promotion de la gestion intégrée et de l’économie des déchets Solides ( PROMOGED) est attendu ,de même une convention entre la Société nationale de gestion des déchets (SONAGED) et la commune de Palmarin est à envisager).
En définitive les réponses envisageables dans la protection de la Nature et du cadre de vie constitueraient un instrument vital pour accomplir les 17 objectifs du développement durable grâce à leur capacité de pouvoir stimuler une croissance économique partagée, de créer des emplois d’attirer des investissements, de lutter contre la pauvreté, d’améliorer le niveau de vie des communautés locales, de promouvoir l’autonomisation des femmes et des jeunes, de protéger le patrimoine culturel, de préserver les écosystèmes terrestres et maritimes ainsi que la diversité biologique, de soutenir le combat contre le changement climatique et, finalement, d’accompagner la société dans sa nécessaire transition vers une plus grande pérennité.
Au-delà, de Palmarin c’est tout le littoral et particulièrement l’ensemble des iles qui méritent cet appel à la mobilisation.
Abdou Sané ancien député, géographe –environnementaliste et expert en réduction des risques de catastrophes.
Email : abdousaneganthio@gmail.com
Sénégal.